Inquiétude au Sahel : Rétablir la sécurité pour revigorer l’agriculture.
La situation des agriculteurs et le futur de l’industrie agricole au Sahel sont sources de préoccupation. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés a recensé plus de trois millions de déplacés internes au Mali, au Niger et au Burkina Faso nous apprend RFI. Face à cette détérioration sécuritaire, comment peut-on relancer le secteur agricole ? C’est le sujet abordé dans un rapport récent de l’Institut Montagne, qui exhorte à investir dans l’agriculture en Afrique de l’Ouest.
Le vol de bétail et le pillage des récoltes ont poussé de nombreux agriculteurs à quitter leurs terres, témoigne Ousseini Ouedraogo, un agronome burkinabè et directeur du Roppa (Réseau des Organisations Paysannes et de Producteurs de l’Afrique de l’Ouest). « Beaucoup d’agriculteurs ont été contraints de quitter leurs terres », explique Ousseini Ouedraogo. « Bien que certaines zones aient été libérées, on assiste actuellement à un retour des agriculteurs indique RFI. Cependant, cela a eu un impact sur la production agricole et la sécurité alimentaire dans de nombreuses localités et même dans certains pays. »
Le directeur du Roppa constate que certains agriculteurs sont retournés dans leurs exploitations à Kombori et Aoréma, dans le nord du Burkina Faso. Cependant, l’abandon des zones rurales est l’un des facteurs de l’insécurité dans la région, selon Jonathan Guiffard, chercheur associé à l’Institut Montaigne à Paris se confiant à la même source.
« Un des principaux facteurs de recrutement des groupes jihadistes est la marginalisation économique des populations rurales », explique-t-il. « Ce sont elles qui ne bénéficient pas des mêmes ressources et des mêmes richesses que dans les villes. Nous sommes confrontés à des pays qui, certes, sont peu développés, mais qui connaissent néanmoins une croissance significative avec de nombreuses opportunités économiques insuffisamment réparties. »
Cibler les Investissements
Le rapport, coécrit par Jonathan Guiffard (disponible ici), lance un appel en faveur de l’investissement dans le secteur agricole de l’Afrique de l’Ouest. Il préconise de stabiliser la politique foncière, de construire de nouvelles infrastructures et de prendre en compte des questions longtemps négligées.
« Ce rapport ne propose pas de solutions révolutionnaires, mais il souligne la diversité des problèmes à traiter en même temps », précise Guiffard. « Il n’y aura pas de politique publique unique capable de résoudre tous les problèmes du développement agricole. Cependant, en travaillant simultanément sur ces différents aspects, en impliquant le secteur public et privé, nous estimons qu’il y aura des améliorations significatives. »
Toutefois, Ousseini Ouedraogo rappelle que les investissements doivent être ciblés et bien encadrés. « Il est crucial de sélectionner soigneusement les investissements », souligne-t-il. « Investir dans la transformation agroalimentaire et faciliter l’accès des petits producteurs au marché intérieur est une option judicieuse. En revanche, les investissements qui favorisent l’accaparement des terres ne sont pas bénéfiques. »
Il exhorte les États à investir, notamment pour réduire les pertes alimentaires, qui représentent environ un tiers de la production en Afrique subsaharienne.