Les travaux de réaménagement par l’État engendrent deux ans et demi d’inaccessibilité des terres agricoles, plongeant la région dans une situation critique.
La région de Podor, située dans le nord du Sénégal, fait face à une menace imminente d’insécurité alimentaire, alors que les riziculteurs locaux voient leurs terres devenir inaccessibles depuis deux ans et demi. Les travaux de réaménagement entrepris par l’État, dans le cadre du Projet de réhabilitation et d’extension des périmètres irrigués villageois (PREPIV), ont causé des retards considérables, laissant de nombreuses exploitations en friche depuis septembre 2021.
Les périmètres irrigués villageois (PIV) de l’Île à Morphil, composée de plusieurs villages entre le fleuve Sénégal et son affluent le Doué, n’ont pas été exploités depuis le début des travaux, selon les témoignages des riziculteurs. Cette situation a entraîné une réduction significative de la production de riz dans la région, déjà affectée par des aménagements agricoles obsolètes.
Le coordonnateur du PREPIV, Elhadji Mar, explique que le projet vise à réhabiliter et étendre les périmètres irrigués villageois, couvrant un total de 3 000 hectares. Le coût de ces travaux s’élève à 18 milliards de francs CFA, financés conjointement par l’État du Sénégal et la Banque ouest-africaine de développement.
Cependant, les riziculteurs de la région expriment leur frustration face à la durée des réaménagements, soulignant que plusieurs saisons de production ont été perdues. Yaya Oumar Aw, un riziculteur de Guédé Village, témoigne de l’impact sur sa communauté, où seules quelques familles disposant de périmètres privés peuvent encore se livrer à la riziculture.
La rareté du riz dans la zone est devenue criante, entraînant une hausse des prix. Le kilogramme de riz est désormais vendu entre 400 et 500 francs CFA, comparé à 300 à 350 francs auparavant. Les habitants de l’Île à Morphil, autrefois producteurs de riz, sont désormais contraints d’acheter cette denrée essentielle à des prix exorbitants.
La situation est particulièrement difficile pour les villages tels qu’Agnam Tonguel, Koppé Mangaye, Mboyo, Guédé Ouro, Diama Alwaly, Korkadié, Lahel, Diaw, Moundouwaye, Halwar, et d’autres, qui ont vu leurs terres devenir inaccessibles depuis la mise en œuvre du PREPIV en septembre 2021.
Elhadji Mar reconnait le retard des travaux mais assure qu’une partie des réaménagements est déjà terminée. Cependant, les riziculteurs attendent toujours la livraison des équipements agricoles, retardée par un fournisseur sénégalais.
Pour atténuer les difficultés financières des ménages affectés, l’État a mobilisé 316 millions de francs CFA, distribués entre 88 groupements d’intérêt économique de riziculteurs. Cependant, des témoignages font état de difficultés dans la distribution des fonds, avec des agriculteurs affirmant ne recevoir qu’une fraction de l’argent promis.
Face à cette crise imminente, les riziculteurs de Podor appellent à une action rapide pour garantir l’accès à leurs terres et éviter une insécurité alimentaire dans la région.